Nos attentes ont-elles un impact sur la manière dont un traitement soulagera la douleur? L’un des facteurs clés permettant de prédire les effets sur la santé est ce que nous pensons qu’il va se produire avant de recevoir un traitement. Il est connu dans le domaine de la recherche que si nous nous attendons à des choses positives, il est plus probable que des choses positives se produisent. Autrement dit, lorsque nous pensons qu’un traitement soulagera notre douleur, cela tend à favoriser une meilleure gestion de la douleur.
But
Stéphanie Cormier et Alexandra Lévesque-Lacasse étaient intéressées à mieux comprendre quelles sont les caractéristiques biologiques, psychologiques et sociales des personnes et comment ces caractéristiques sont associées avec les attentes des personnes qui reçoivent des traitements pour la gestion de la douleur dans une clinique multidisciplinaire. Il s’agit d’un élément important, car des études antérieures ont permis de démontrer que lorsqu’on demande aux personnes quel est le degré de soulagement de la douleur qu’elles pensent avoir, cela représente l’un des meilleurs moyens de prédire le succès du traitement.
Méthodologie
Le Registre Québec douleur est une base de données en ligne qui comprend des informations sur les patientes et patients des cliniques multidisciplinaires de la douleur dans la province de Québec, au Canada. Dans cette étude, les chercheuses ont utilisé les données de 3 110 personnes traitées entre novembre 2008 et avril 2012. Avant leur première visite à la clinique de la douleur, les participantes et participants ont rempli une série de questionnaire sur leurs attentes quant au soulagement de la douleur grâce aux interventions proposées à la clinique. On leur a aussi demandé de remplir des questionnaires sur diverses variables biopsychosociales comme la durée, l’intensité et la localisation de la douleur, la santé physique et l’interférence de la douleur, la santé psychologique (dépression, catastrophisme, colère, santé mentale) ainsi que les caractéristiques sociodémographiques (âge, sexe, origine ethnique, état civil, niveau d’études, statut d’emploi, prestation d’invalidité). Les personnes ont été classées en quatre groupes distincts : ceux qui avaient des attentes faibles, modérées, élevées et très élevées concernant le niveau de soulagement de la douleur qu’elles anticipaient suite aux traitements qu’elles allaient recevoir à la clinique de la douleur.
Résultats
L’équipe de recherche a identifié quelques caractéristiques des personnes dont les attentes étaient différentes en matière de soulagement de la douleur. Dans l’ensemble, les attentes étaient moins élevées chez les plus jeunes (les personnes plus âgées avaient des attentes plus élevées pour la gestion de la douleur), chez les hommes (les femmes avaient des attentes plus élevées pour la gestion de la douleur) et chez les personnes blanches (les personnes non-blanches avaient des attentes plus élevées pour la gestion de la douleur). Il a aussi été constaté que des plus petites attentes pour la gestion de la douleur étaient observées chez les personnes dont la douleur durait depuis plus longtemps, dont la santé et leur fonction physique étaient moins bonnes, qui avaient des symptômes de dépression plus graves et qui recevaient des prestations d’invalidité. Ces attentes différentes pourraient se justifier par le fait que certaines personnes ont essayé de nombreux traitements avec peu ou pas de succès, ce qui peut avoir contribué à réduire leurs attentes en matière de gestion de la douleur.
À retenir
Comprendre quelles personnes sont plus susceptibles d’avoir des attentes plus ou moins élevées pour la gestion de la douleur peut aider les médecins à offrir des interventions ciblées pour contribuer à améliorer les attentes de ces patient.e.s. Il est important de renforcer les attentes des patient.e.s. car cela peut augment leur probabilité de succès face à un traitement pour la douleur. Par exemple, la prise en charge rapide des difficultés psychologiques pourrait permettre aux patient.e.s d’adopter un point de vue plus positif sur les options thérapeutiques à venir, ce qui pourrait potentiellement se traduire par une meilleure gestion de la douleur.